mehryl ferri levisse

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les théâtres de mehryl ferri levisse

la distinction faite art

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par delà les artifices

la collection monstrueuse ou la domestication des anomalies

de(s) nouvelles (de) pénélope

esthétique du corps neutre, plasticité critique

mehryl ferri levisse : l'homme objet

la multitude des corps

face-à-face et corps-à-corps

des corps & décors

la complexité du "je" d'enfant

l'éternité n'est pas une abstraction

ceci n'est pas de la photographie

l'art du rituel

 

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the space for a certain energy : mehryl ferri levisse interviewed

mehryl ferri levisse / interview

agreed roles : fetish and theater in the masks of mehryl ferri levisse

mehryl ferri levisse's staged dreamworlds invoke family tradition and bdsm

mehryl ferri levisse's intimate world

french artist mehryl ferri levisse brings bdsm fantasy to the bowery

Sarah Ihler-Meyer

Les théâtres de mehryl ferri levisse

février 2023

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Entre freak show, cabaret et carnaval, Mehryl Ferri Levisse déploie des théâtres psychiques peuplés de créatures hybrides et chimériques déjouant les frontières entre les genres et les règnes. Au diktat rationaliste et fonctionnaliste du monde moderne, il oppose une démesure et une déraison qui laissent libre cours à des fictions où se mêlent histoires familiales, désirs intimes et imaginaires collectifs.

 

Ces fictions se présentent sous deux formes principales. D'une part, des "captations photographiques" où l'artiste se met en scène dans des espaces domestiques chargés de souvenirs - grenier, baignoire, salon, chambre à coucher, salle à manger et salle de jeux - qu'il chamboule et réagence cul par-dessus tête. Inspiré par des motifs de peinture d'histoire et du portrait classique, il prend des poses absurdes - couché sur un tas de coussins, coincé dans une pile de matelas, allongé sur un lit de moules -, le visage le plus souvent dissimulé dans des cartons, des cubes de Lego ou sous des draps, sinon recouvert d'escargots, de végétaux et de coquillages. D'autre part, des masques et des costumes agrégeant matériaux semi-précieux, organiques et ornementaux - fils d'or, sequins, fourrure, cuir, cheveux, collants, tapisseries et maquillage. Soclés, ces derniers s'apparentent à des trésors ésotériques, à des fétiches vaudous ou à des reliques de rituels chamaniques ; présentés sur des mannequins hyperréalistes ou activés par des performeureuses, ils reconfigurent des corps à la fois neutres et exubérants. Autant de personnages qui s'inscrivent dans des espaces confinés, sans portes ni fenêtres, recouverts de papier peints aux motifs floraux ou abstraits évoquant des tests de Rorschach psychédéliques. Il arrive aussi qu'iels s'invitent dans d'autres espaces, en particulier des centres d'art, qu'ils requalifient instantanément.

 

Un monde baroque et onirique s'offre ainsi à nous. S'y côtoient des figures aux réminiscences de vamps, drags, bouffons du roi, Zoulous et médecins de peste, comme sorties des limbes et des marges, acteur.rices de fantasmes et de scènes mythologiques. Ainsi la série Anthropophages & Carnassiers (2011) qui réactive le mythe du repas totémique : au cours de ce dernier, les "frères chassés" sacrifient un animal, en réalité substitut du père, et le dévorent pour s'en approprier les pouvoirs. Une manière pour Mehryl Ferri Levisse d'éprouver des devenir-autres par contamination et absorption réciproques entre humains, végétaux et animaux. Il s'agit là d'une nouvelle sorte de tératologie : malformations et monstruosités y sont célébrées comme autant de formes de vie possibles, affranchies des normes sociales et ouvertes à toutes les métamorphoses.

 

 

 

 

 

 

 

 

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